dimanche 22 octobre 2017

Premières lignes #12 : "Victor Hugo vient de mourir" de Judith Perrignon

Ce rendez-vous hebdomadaire a été créé par Ma Lecturothèque.

Le principe est simple : il s’agit de présenter chaque semaine l’incipit d’un roman.

Ce rendez-vous est très intéressant car il nous permet de découvrir en quelques lignes un style, un langage, un univers, une atmosphère.

On choisit le livre que l'on veut : un coup de cœur, une lecture actuelle, un livre de sa PAL, un emprunt à la bibliothèque...


Suite à l'incipit de la biographie de Victor Hugo par Max Gallo la semaine dernière, je me suis demandée si les premières lignes du très court livre de Judith Perrignon, Victor Hugo vient de mourir, vous intéresserait... Ce serait une belle façon de tourner la page... avant de rédiger mes chroniques. :) 


Le poète vient de rendre son dernier souffle et, déjà, la nouvelle court les rues, entre dans les boutiques, les ateliers, les bureaux. Paris est pris de fièvre. Chacun veut rendre un dernier hommage et participer aux obsèques nationales qui mèneront l'Immortel au Panthéon. Deux millions de personnes se presseront sur le parcours du corbillard en ce jour de funérailles intense et inoubliable.
D'un événement historique et en tout point exceptionnel naît un texte intime
et épique où tout est vrai, tout est roman.


       Ils ont déjà peur, le désordre vient si vite.
      Depuis la veille, les officiers de paix en faction devant l'hôtel particulier récupèrent les bulletins médicaux dans le vestibule. Ils en font des rapports qui finissent sur les bureaux de la préfecture. Ils sont signés Féger, chef de la brigade du 16e arrondissement. "Nuit relativement calme", dit le dernier, publié à sept heures trente ce matin.
     Mais dans Paris, partout les crieurs de journaux annoncent la fin. Au point qu'un commissaire de police s'en inquiète, envoie un télégramme au cabinet du préfet : ne faut-il pas les interdire ? Ce matin même, rue Charlot, un opticien a demandé à un gardien de la paix d'interpeller le colporteur du Cri du peuple qui hurlait les derniers instants. Il ne voulait rien entendre de tel, il a bouclé sa boutique, escorté l'agent et le vendeur jusqu'au commissariat. Nom prénom adresse ? Lefèbre Théodore, trente-neuf ans, passage du Génie, numéro 10, a bougonné le crieur. Un peu plus tard, même scène rue Saint-Martin : un brigadier est accosté par plusieurs personnes indignées qui lui désignent l'homme qui marche, journal à bout de bras, messager de l'inéluctable. Tout autour la foule est comme la porcelaine, soudain fragile, monsieur l'agent, arrêtez-le, faites-le taire ! Elle voudrait retenir les jours, même s'il n'en reste que trois, que deux, même si c'est pour demain. Encore une fois, le brigadier mène le vendeur devant un commissaire de police. Nom prénom adresse ? Saloizi Adolphe, rue de Crimée, 76, répond le colporteur. Le commissaire le sermonne puis le renvoie dans la rue. Rien d'illégal, ni le journal, ni ce qu'il raconte : Victor Hugo va mourir.


Victor Hugo va mourir, Judith Perrignon, Pocket, janvier 2017, 168 pages, 5,95 €.


Je vous souhaite un très bon dimanche !

A demain ^^




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