mardi 30 janvier 2018

"Coupez !" de Cameron McCabe

Un polar culte

Les éditions Sonatine nous propose un roman policier atypique, publié en Angleterre en 1937.



Présentation de l'éditeur

Un polar Hollywoodien entre roman noir et jeux littéraires.
Années 30, Londres. Cameron McCabe travaille au montage d'un film, lorsque son producteur lui demande de couper toutes les scènes dans lesquelles intervient une jeune actrice, Estella Lamare. McCabe a du mal à comprendre cette décision aussi surprenante que soudaine. Le lendemain, le corps d'Estella est retrouvé dans la salle de montage.
McCabe décide alors de mener seul son enquête. Il nous raconte ses pérégrinations dans le monde du cinéma et compte les suspects, nombreux autour de lui.
Tout à coup, son récit s'arrête.
Et l'affaire prend une tournure tout à fait inattendue.


Mon Avis

"Extraordinaire", c'est le mot juste pour qualifier Coupez ! de Cameron McCabe. C'est ainsi que le qualifie Jonathan Coe, célèbre écrivain britannique, qui a écrit l'introduction de cette édition. Elle est composée de trois parties. La première est le récit de Cameron McCabe à la première personne, la deuxième est racontée par un autre personnage du livre qui donne une explication plus approfondie du récit (et il révèle la clé de l'énigme). La troisième partie est une interview inédite de l'auteur. Pourquoi Coupez ! vaut la peine d'être lu ?

Coupez !, de son titre original The Face on the Cutting-Room Floor, est un récit "vintage" tout à fait surprenant, qui mêle enquêtes policières, monde du cinéma et Londres des années 30. Cameron McCabe est monteur dans une boîte de productions de films, à Londres. Il est en train de travailler sur un film événement lorsque le réalisateur lui ordonne de couper, sans raison apparente, toutes les scènes dans lesquelles apparaît Estella Lamare, jeune actrice prometteuse. Le lendemain, elle est retrouvée morte dans la salle de montage. Deux enquêtes policières vont rythmer le récit : celle de Smith, inspecteur de Scotland Yard, et celle de McCabe, qui mène sa propre enquête. 

"— Qui est Smith ?
— C'est le cador de l'affaire. Le fouille-merde officiel.
— Et vous, vous êtes le fouille-merde officieux ?
— Il y en a beaucoup, dans cette affaire et sa périphérie.
— Tous égaux en droits, y compris les autres.
— Oui, et n'importe qui peut raconter n'importe quoi.
— L'ambiance au studio doit être tout à fait charmante.
— Ce n'est plus un studio, c'est un asile d'aliénés." (page 157)

Nous retrouvons tous les codes du roman policier, le meurtre, l'enquête policière avec les interrogatoires, les révélations. Cependant, l'originalité extraordinaire de ce récit se trouve au milieu du livre : un événement inattendu nous surprend, nous désarçonne. Nous ressortons un peu sonné de ce "break" et notre lecture change totalement de perspective. Ce roman aux allures hitchcockiennes et à l'ambiance rétro est surprenant par ses rebondissements, par sa construction narrative et par sa révélation finale, à laquelle nous nous attendions pas. 

L'intérêt de ce roman est également marquée par le mystère qu'il l'entoure. L'identité de son auteur a été inconnue pendant des décennies. L'auteur, qui a utilisé le nom de son personnage principal, est en réalité un Allemand qui s'est exilé en Angleterre pour fuir l'Allemagne nazie. Une enquête (rapportée dans le livre) a été menée et a révélé son véritable nom, Ernest Bornemann. La troisième partie nous révèle beaucoup sur sa personnalité, riche et intrigante. Insatiable, il a tour à tour été écrivain, scénariste, anthropologue, ethno-musicologue, musicien et critique de jazz, psychanalyste, sexologue et militant socialiste. Une vie bien remplie.

"J'entendis les tramways dans King's Cross Street, un drôle de coup de klaxon d'un bus de passage et un camion si lourd qu'il fit trembler les murs. Puis une faible mélopée s'éleva du plateau B. Ils étaient encore en train de faire des raccords pour la scène du night-club de Black and White Blues. Et je percevais les bruits du plateau A, aussi. Robert Seaman tournait Conversation after Midnight." (page 53)

Pour en revenir à l'intrigue, ce roman policier est un véritable ovni qui ravira tous les amateurs de polars et d'énigmes. L'auteur pose ses personnages, puis remet absolument tout en question, jusqu'à ce que tous les protagonistes soient suspects. Ce récit surprendra à tous les coups.

En bref, Coupez ! est un récit absolument original, qui mêle roman policier et monde du cinéma, le tout dans un décor londonien fascinant des années 30. Ambiances hitchcockienne et jazzy, une construction narrative atypique et un "twist" totalement inattendu au milieu du livre, ce récit de 1937 publié pour la première fois en France ravira les amateurs de romans policiers et plus généralement, tous ceux qui adorent les romans à énigmes. 



Un grand merci aux éditions Sonatine !

Coupez ! (The Face on the Cutting-Room Floor), Cameron McCabe, traduit de l'anglais par Héloïse Esquié, Sonatine, janvier 2018, 379 pages, 21 €, format numérique : 14,99 €.


A bientôt ^^







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